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diaphane express

19 mars 2012 1 19 /03 /mars /2012 21:40

ils mirent plus de deux siècles

sueurs écoulées, meurtrissures des paumes, le grincement des poulies, le souffle des bêtes,

les hommes et les voûtes arc-boutées soumis à la démesure du beau

la miche toute de poussière blanche que l’on coupe et partage, le saindoux sur la mie, nourriture terrestre au repas du dépassement

l’œuvre s’élève de patience et de sang, de visions et d’efforts, d’ambition et de morts

sur le pavé, le copeau, la foi et la souffrance

je suis gargouille, je suis née du tourment de vos âmes

pierre arrachée à la terre ou vous vous nourrissez

je suis témoin de roche figé à vos devenirs

je vois vos bougies, vos lanternes, vos ampoules

les chevaux qui meurent et deviennent mécaniques

et pour régler vos guerres, vos armes démoniaques

balafres à l’édifice, de l’épée à la bombe

j’ai vu tant de vos folies

soutanes de torture et confessions forcées

chariots contaminés et bûchés de tourments

 

bonnets phrygiens hurlants

éclats de ma peau à vos marteaux assassins

le bourg s’est agrandi

et sa misère, ses commerces, son armée

comme devenus vos images

aux fortes nuits de pluie, j'éructe et crache de sombres rictus à ma gueule éternellement béante et muette au spectacle de votre démesure si tendue vers le laid

laideur de fracas

j’ai vu vos bombes, brasiers de chairs et de cris,

échos des uniformes, visages inclinés maquillés de terreur

éclats de destructions et peuples déchirés

je vous ai vu bâtir l’impossible et puis brûler vos œuvres

vos mains tendues aux chimères d’idéaux

votre soif de l’unique et de l’instantané

vos affres illusoires

les hommes et les voûtes toujours arc-boutées soumis à leurs valeurs,
au monde qu’ils ont fait

un vent de fin de nuit vient mordre ma matière

je noircis, je m’écaille aux gifles de vos acides

ils n’ont mis que deux siècles pour salir ma lumière

et me laisser pantelante, abîmée et lucide 

 

parfois,

mais vos yeux invisibles ne peuvent m’apercevoir

de granit je suis argile

je m’étire doucement, me relève

et je laisse entre mes lèvres de pierre

s’échapper l’appel de mon dépit

aux bras du temps

 

peintures : véronique groseil

(je dédie ce texte à ma mère)

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commentaires

M
<br /> Lorsque la pierre gargouille...<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br />  <br />
Répondre
D
<br /> <br /> oui c'est tout à fait ça, la pierre qui nous survivra, merci Miche<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Bonsoir,<br /> <br /> <br /> merci pour ce beau et véridique poème<br />
Répondre
D
<br /> <br /> Sagahan<br /> pardon pour le retard à répondre, mais pourquoi ne pas laisser l'adresse de ton blog, il le mérite, le dessin et l'écriture se complétent depuis longtemps  <br /> merci et à bientôt<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> J'aime entendre cette gargouille, elle me ramène à ma courte existence d'humaine.<br />
Répondre
D
<br /> <br /> merci Mony, les pierres et édifices m'ont toujours fascinés, porteurs de nos histoires et témoins du passé, ah si l'architecture présente avait le même reflet et la même durabilité, on laisserait<br /> à notre tour notre testament idéologique et artistique,<br /> les temps changent...<br /> <br /> <br /> <br />
V
Superbe texte... magique et puissantcomme ces figures de pierrequi semblent nous défieret qui y parviennent.
Répondre
D
<br /> <br /> merci Viviane, venant de toi ce compliment ne m'en réjouit que plus<br /> <br /> <br /> <br />
N
C'est franchement très beau et très bien écrit. Je découvre ton blog par le biais de celui de Russalka, et j'en suis ravie. Merci.Nanou
Répondre

voyages immobiles

pétrir les nuées,

ce jus d’humain

écarlate et bleu parfois

aux stries asséchées,

des paradoxes d’histoire

font les aubes béates,

se pencher au miroir tremblotant,

s’y voir et plonger la main

à tâtons y cueillir l’amour

city.jpg

viens,

il traine ici des relents de soufre,

ces nuits d’uniformes

de cagoules et de coups,

palper les vides,

filets d’égoïsme, d’ignorance,

gris et encore cramoisis,

villages bombardés,

vos crachats meurtriers font les différences,

aux arrières cours,

les limousines et costumes veillent,

cravates au fond des banques,

transis mais toujours à l’affut,

retrouver la rue,

le droit de dire, de se préserver…

 

viens,

on va se faire des baisers,

se toucher et frémir,

se plonger en iris,

dire caresses et mots,

faut surmonter comme excrément peut-être,

leur héritage,

leurs protocoles et tabous,

et si les gestes sont mêmes,

les échéances dévoreuses et lénifiantes,

ne laissent en germes

que déserts et murs,

sur la vitre,

méandres de pluie,

ta peau aux confins d’étoffe,

survivance éphémère et fragile,

faire avec l’instant…

thailande.jpg

viens

ne pas se perdre au fond des jungles,

aux chauds effrois du désert,

aux spasmes du fleuve, tourmenté et haletant,

chercher le parasite au tréfonds du poil,

ces sourires édentés,

de sagesse, d’aride et de moussons,

les peaux se touchent, se mêlent,

engluées,

débris de marécages, forêts tatouées au bitume,

filets qui suintent, dépouillés de frémissements,

glaces orphelines et mourantes,

on tend même plus la main

pour dire au secours, pour connaître l’autre,

des bruits de sirène et de moteurs,

si loin de l’ocre cloaque des eaux nourricières,

et ces marbrures vérolées qui veinent l’argile,

sagesse.jpg

viens

traversons ensemble

la courbe de brume et ces vagues d’illusions,

dans leur coupe, le sang du sacrifice

tout comme la bombe dans l’autobus,

l’âme a perdu son âme,

à l’ombre de l’édifice, pèlerins affamés d’ailleurs,

englués de certitudes,

croix, croissant, étoile,

la mitraillette aux portes du temple,

et des voiles de drapeaux et d’armures,

derniers battements de cœur,

mais restent les légiférants,

et nous courbés, boucliers d’égoïsme,

muets et tremblotants,

voila quelquefois des mains qui se serrent,

les bouches fumantes des sillons chuchotent,

aux reflets aveugles des cités,

je suis à genou ?

peut-être avec toi,

juste au nom de l’humain…

auroville.jpg

...

Dans L'armoire

une présence

...un peu de douceur,
dans un monde de brutes...